Mission Grand dauphin Eté 2014 - Journal de bord 4
23/09/2014
Journal de bord

Suite et fin de la campagne GDEGeM Eté 2014 menée par le GECEM dans les eaux provençales à la recherche du Grand dauphin.
Mardi 16 septembre
Départ à 7h du port de menton, belles maisons colorées au lever du soleil. La frontière et la limite de zone est atteinte, demi-tour et direction Cassis plein ouest. Mer calme, la matinée débute bien avec un groupe d’une dizaine de dauphin au cap Saint Jean Cap Ferrat. On les accompagne plein sud une demi-heure, avant que nos Stenellas nous fassent clairement comprendre qu’on les dérange. Poursuite de la navigation : Canne, Nice …… un beau poisson lune. L’après-midi, c’est jour de pêche au thon : Julie repère plusieurs groupes que nous tentons d’approcher : peine perdue, le spectacle des thons sautant hors de l’eau s’arrête chaque fois à notre approche. Toujours mer calme et grand soleil, on commence à cuire sérieusement sur le bateau : J. repère un cachalot un peu avant la baie de St Tropez qui fait splach, qu’il est le seul à voir (la chaleur, l’insolation ?) on dévie de notre route, on cherche en vain. Bredouilles. La suite : retour tranquille Baie des Canebiers et apéro – gâteau chocolat !
Gilles
Mercredi 17 septembre
C’est au tout petit matin encore bleu de sommeil, à l’abri dans la baie des Canebiers sous La Madrague, fortement bercés mais au chaud dans nos duvets et bannettes respectives (ou pont pour certain…), qu’une voix tout juste éveillée venant du carré nous annonce : « ça souffle !... Le coup de vent annoncé pour la fin de journée est déjà là… ». C’est ainsi que Julie, notre skippeuse, à l’affût du moindre dialogue étroit entre les drisses et Eole et pourparler soutenu entre les amarres et Neptune, nous prépara doucement à l’éventualité que cette journée de mercredi ne serait pas propice à l’observation de nos chers cétacés…Branle bas tranquille autour de café et thé brûlants afin de réfléchir à la suite à donner à notre mission que personne ne souhaitait voir s’écourter !
Constat : le coup de tabac d’Est annoncé pour le jeudi était toujours maintenu mais celui-il avait pris de l’avance et se pointait dès aujourd’hui ! Seul espoir : les conditions d’observations pouvaient encore être favorables pour vendredi.
Ni une ni deux, la décision était prise de quitter notre mouillage et d’avancer au maximum vers l’Ouest pour trouver refuge dès le soir même et le jeudi entier dans un port sympathique, de façon à être, le vendredi, sur une zone proche de Cassis pour notre dernier jour d’observation.
Il est à noter que nos premiers ressentis teintés de morosité et de déception se transformèrent peu à peu (assez rapidement…, il faut le dire !) en une joie communicative de convier Cap Délices à aller causer avec les Eléments !
Stimulés par les étincelles qui brillaient dans les yeux de notre Capitaine (appel de la mer quand tu nous tiens !...) et la bonne humeur de l’équipage, c’est gonflés à bloc d’Envie et de Confiance (envers le Capitaine surtout…) que nous étions prêts à affronter sportivement le Large !!!
Du coup, nous quittâmes au moteur notre baie protectrice, comme à notre habitude vers 7h15... (et oui, effort ou pas, on ne déroge pas à la règle sous l’oeil vigilant et bienveillant de Julie, notre chef de mission et bosco pour l’occasion…) avec une houle de face déjà bien formée… Tellement bien formée, qu’une lame un peu plus audacieuse et joueuse que les autres voulut tester notre mise en condition en ferlant énergiquement sur le pont de la proue jusqu’au cockpit et à la descente…, et réveiller ainsi les derniers endormis (moi en l’occurrence…) ! Ca y Est ! Nous y étions…, bonjour Neptune !
En réponse, à la sortie de la baie, hissage de la Grand’ Voile et du Génois et cap à l’Ouest toute !
Eole, qui n’est pas en reste et veut jouer aussi, nous porte, à grand coup d’accélérateur, à une allure folle ! La côte et le Large, lentement et patiemment scrutés la veille dans le sens inverse, défilent rapidement sous nos yeux… Toute tentative soutenue d’« effort » (si, si…, nous avons quand même tenté…) s’avère vite difficile et insoutenable !
En tout cas, aucun d’entre nous, occupé à scruter l’horizon (chacun pour des raisons diverses…), n’a pu déceler l’apparition du moindrecétacé en surface… Quelle idée auraient-ils eu d’ailleurs de venir se faire chahuter et de boire la tasse en surface alors qu’ils étaient tranquillement à l’abri en profondeur ?!
Seuls, des puffins curieux et rieurs de croiser le seul voilier présent en mer…, nous ont accompagnés dans notre périple…, même lorsque en fin de matinée, le vent se mit à forcir et que les grains se mirent à déverser une pluie battante et drue. En l’espace de quelques minutes, changement d’Hémisphère et d’allure : nous nous retrouvâmes à surfer vent arrière dans les 40ème rugissants (ou en tout cas…, avec leurs cousins… germains !).
Paysage Magnifique, Ambiance Sublime et Situation Insolite !!!!
Toutefois, après cette séance de surf « extrême » sous force 5, l’idée d’une halte à Porquerolles, en vue à l’horizon sous un arc-en-ciel complet…, fut source de soulagement !... Quoi de mieux qu’une pause dans une crique aux couleurs paradisiaques (turquoise et émeraude) à l’abri des rafales d’Est pour nous remettre de nos émotions, reprendre des forces, remplir les estomacs soumis à rude épreuve… et faire un point météo complet !
A peine requinqués, le verdict tomba ! Aggravation des conditions climatiques annoncées avec pluie, orages, mer formée et vent d’Est établi à force 6/rafales à 7 dès la fin d’après-midi et étendues jusqu’au vendredi..., réduisant ainsi à néant nos dernières chances d’observation et stoppant net la mission pour la semaine ! Décision quasi-immédiate, confirmée par l’arrivée de risées de plus en plus violentes et fréquentes : quitter Porquerolles au plus vite afin de ne pas être bloqués jusqu’à samedi et cap direct sur Cassis pour prendre de l’avance sur le coup de tabac annoncé et ne pas faire connaissance avec les cousins des 50èmes hurlants!
Après calcul, et à la plus grande joie de Magali, nous prîmes une route directe au plus près du Cap Sicié pour nous permettre d’arriver au plus vite avant la nuit et, qui sait, de croiser peut-être le cachalot… qui se « cache sous l’eau », vous savez, l’ami de Julien !... Mais c’était sans compter la Marine Nationale qui décidât de jouer à la bataille navale… un jour de tempête ( !...) et nous forçat, comité d’accueil sur zone à l’appui (aviso, hélicoptère, avion de reconnaissance…), à passer à plus de 5 miles au large… du Cap Sicié ( !..., déception de Magali qui ne perdît pas pour autant son sens de l’humour…) rallongeant du même coup notre parcours de 2 heures et nous éloignant de la possibilité de croiser dorsale, caudale ou souffle familiers…
C’est ainsi que nous nous retrouvâmes seuls au Large, la côte noyée et invisible sous les grains, voguant à vive allure en vent arrière, à battre le record de vitesse dans le négoce croisé des vagues et du vent (qui a atteint 10,2 nœuds déjà ?... Julien, notre valeureux timonier ou Julie, notre résistant bosco ?) et, par là même, à assister à un grand moment d’apprentissage d’empannages enchaînés à la volée… Sensations fortes garanties !!!
C’est alors qu’à ce rythme soutenu, l’impressionnant Cap Canaille aux allures de Cap Horn, fit son apparition en fin d’après-midi !…
A partir de là, les séries de départs au lof ou au tas… de plus en plus virulents ont commencé à faire place aux séries d’empannages jusqu’alors contrôlés… Frissons au rendez-vous malgré le regard zen et amusé de Gilles face à la situation !!!
Vive comme l’éclair, notre Capitaine Julie repris fermement la barre pour dompter Cap Délices qui, sous force 7 et une houle creusée enfin au rendez-vous…, ne souhaitait visiblement pas poursuivre sa course au portant jusqu’au port… A l’écouter, il voulait prolonger l’Aventure en surfant jusqu’à Beauduc (chut ! nous étions secrètement de tout cœur avec lui !)… Un enroulage de génois et une prise de ris autoritaires le firent revenir à la raison… et garder le cap tranquillement jusqu’au port sous l’œil admiratif de Gilles, cette fois-ci.
C’est donc à la nuit tombée que, rincés, épuisés mais heureux, nous regagnâmes peu à peu le calme et le silence de la Calanque de Port-Miou pour célébrer autour d’un rhum (réconfort après l’effort…) notre fin de mission ponctuée par cette magnifique journée, riche en sensations et rebondissements, et au cours de laquelle, nous en sommes convaincus…, nous avons été escortés jusqu’au bout, sous la bonne garde de nos chers dauphins et… cachalots !
Pascale